samedi 29 août 2015

La Rochefort 10, une belle et solide brune, bel et bien trappiste !

J'entends déjà les grands amateurs et connaisseurs du monde de la bière se demander quel est l'intérêt d'un énième article sur une bière déjà archi-connue et reconnue internationalement. Et de même se demander pourquoi préciser dans le titre qu'elle est "bel et bien trappiste", ce qui peut paraître d'une évidence criante.
Eh bien je leur répondrai que c'est loin d'être d'une évidence criante pour tout le monde, y compris certaines personnes se disant "grands connaisseurs" de la bière et ne se gênent pas pour débiter des âneries grosses comme eux. Ainsi il y a peu, j'ai eu affaire lors d'un marché à une personne affirmant bien connaître les bières belges qui, voyant écrit en gros sur les étiquettes de Rochefort la mention "Trappiste", prit son air important de donneur de leçon et dit : "Rochefort ? Trappistes ? Je n'en suis pas sûr. A votre place, je me méfierais. Il n'existe qu'une seule vraie bière trappiste, et c'est la Chimay !"
Deux belles c... sur deux phrases, pas mal... J'ai bien essayé de discuter un peu mais cela semblait peine perdue avec ce "grand connaisseur" des bières belges. 

Bref, ce petit exemple tout bête montre qu'il faut souvent répéter des choses qui peuvent paraître évidente ! 

Que signifie le terme "trappiste" ? Il vient de l'Abbaye bénédictine de la stricte observance de La Trappe, fondée en Normandie au XVIIe siècle. Elle essaima par la suite notamment vers les Provinces Unies, actuelles Belgique et Hollande, mais aussi en France. Les moines trappistes "élaborent et commercialisent différents produits, afin d'assurer leur propre subsistance et de venir en aide aux personnes dans le besoin" (www.trappist.be, site de l'Association Internationale Trappiste, ou AIT). Parmi ces produits, la bière, produite par onze abbayes trappistes sur les 20 que compte l'AIT : Achel (Bel.), Scourmont-lès-Chimay (Bel.), Rochefort (Bel.), Orval (Bel.), Westmalle (Bel.), Westvleteren (Bel.), Tilburg (Hol.), Mont des Cats (Fra.), Zundert (Hol.), Spencer (USA), Tre Fontane (Ita.). 
La bière y est brassée selon des recettes monastiques, soit par les moines eux-mêmes, soit de plus en plus sous leurs surveillance, leurs effectifs diminuant sans cesse (ben oui, qui peut bien vouloir être moine aujourd'hui ? ).
Tous les produits issus des abbayes trappistes sont estampillés "Authentic Trappist Product", appellation jalousement protégée par l'AIT. Et que voit-on sur les étiquettes des bières brassées à l'abbaye Saint-Rémy de Rochefort (Belgique, région de Namur) ? Ce petit logo hexagonal : 


Alors les pseudo-connaisseurs, regardez les étiquettes avant de remettre en cause le caractère trappiste d'une bière telle que de la Rochefort, que ce soit la 6, la 8 ou la 10 ! Et sachez que l'appellation "trappiste" est protégée légalement et que toute abbaye brassant de la bière et l'affichant "trappiste" sans être reconnue par l'AIT est passible de poursuites...

Mais n'oublions pas l'objet premier de cet article : la Rochefort 10


Nous avons là une bière brassée à partir de malt pâle pour les surcres fermentescibles, et de malts foncés pour la couleur et les saveurs. Sans oublier le houblon, qui y participe aussi bien évidemment. Je dois rester vague, malheureusement, sur la composition précise, le(s) houblon(s) utilisé(s), les malts brassés... Il est en tout cas certain qu'il s'agit d'une bière de fermentation haute, très forte puisqu'elle titre 11.3 % de teneur en alcool. Elle ne titre effectivement pas 10 % comme l'étiquette pourrait nous le faire croire. Ce chiffre 10 correspond à "une ancienne mesure de densité , le degré légal belge mesuré sur les moûts [liquide sucré résultant du mélange entre l'eau chauffée et les céréales, maltées ou non] avant fermentation de chaque type de bière. (Abbaye Saint-Rémy de Rochefort : visite au coeur d'une bière trappiste (article de lachope.com))

Au visuel, cette bière affiche une robe brun foncé, intense, aux très légers reflets cuivrés. Elle est surmontée d'une mousse ivoire abondante et persistante tout au long du verre.

Au nez, ce col de mousse dégage des arômes doux et moelleux de fruits, donnant l'impression (ne rigolez pas...) de sentir une tarte aux fruits rouges et noirs. Des arômes qui ne rendent pas compte du degré d'alcool de cette bière puisque l'alcool y est à peine perceptible. Cela ne gâte rien, un alcool trop perceptible aux arômes est susceptible de faire reculer certaines personnes avant de goûter. Et ce serait bête de rater cette bière juste pour ça.

En bouche, on commence sur une attaque douce, moelleuse, liquoreuse même, de fruits noirs. C'est à ce moment que l'alcool se révèle : après la douceur de l'attaque, se développe une saveur de fruits rouges macérés dans l'alcool, accompagnée d'une chaleur alcoolisée assez intense pour une bière. Cet alcool dont on sent bien la présence - sans qu'il soit dérangeant pour autant, et c'est là l'une des grandes qualités de cette bière - atténue l'amertume. Cette dernière se révèle donc assez discrète, mais ne se fait pas oublier. On finit par une persistance en bouche assez longue sur le fruit alcoolisé.

A mon avis l'une des meilleures bières d'abbaye trappiste parmi toutes celles que nous propose l'AIT. L'équilibre entre un fort degré d'alcool, une belle douceur et une amertume juste assez développée pour éviter l'écoeurement, me semble plutôt parfait. Une belle et bonne brune que les vrais amateurs de bières fortes apprécieront toujours, mais qui constitue aussi une belle introduction pour ceux qui sont habitués à plus légers et veulent s'essayer à des sensations plus fortes. 

NB. Les appréciations et commentaires donnés ici n'engagent que moi. Ne pas les prendre pour argent comptant car je suis loin d'être un grand spécialiste... Disons qu'ils peuvent servir d'indications.

Elle est disponible et à commander sur www.secretsdebieres.fr