mardi 27 novembre 2018

Petit air d'Allemagne à Independent House

Je vous propose de retourner à Longvic (21) et sa brasserie, récemment apparue, Independent House. Et ce afin, comme promis, de vous en présenter les créations. Enfin une tout au moins... Manquerait plus que je me mette à trop bosser ! Il était question, dans mon précédent post concernant la brasserie, d'une American Pale Ale, d'une Hefe-Weizen et d'une West Coast IPA. Mon titre devrait maintenant vous mettre la puce à l'oreille sur la bière qui va être présentée...

Je vous le donne en mille, c'est l'Hefe-Weizen ! Concernant le style de bière en lui-même, la weizenbier "hefe", je ne vais pas vous refaire le laïus en entier : je l'ai fait il y a peu à propos d'une autre weizenbier bourguignonne, à retrouver ici. Celle de Fabien n'échappe à aucune caractéristique du style weizenbier, encore moins à celles du sous-style "hefe" : mélange de malt d'orge pâle et de froment cru, fermentation haute avec cette fameuse levure spéciale weizenbier, non-filtration pour laisser les levures et protéines de froment en suspension, et laisser davantage de corps et de saveurs à la bière. Le houblon, s'il est forcément présent, reste discret dans ce type de bière. Titrant 4 % de teneur en alcool, l'Hefe-Weizen d'Independent House est une bière légère. Dans l'idéal, je pense qu'on peut la déguster aux environs de 6-7° C. 

Independent House's Hefe-Weizen


Au visuel, elle se pare d'une robe blond pâle trouble, et se coiffe d'une tête de mousse blanche vive mais très fine et qui s'atténue rapidement, persistante en un fin anneau le long de la paroi du verre.

Au nez, les arômes sont discrets, mais on les sent doux et fruités, relevés d'une petite pointe épicée évoquant le clou de girofle. Avec cette pointe épicée et des arômes bananés teintés de miel et de chewing-gum, on retrouve tout à fait la weizenbier allemande classique. Et ce ne sont pas ses saveurs qui diront le contraire.

En bouche, l'attaque est doucement effervescente, qui aboutit sur un corps plutôt riche par rapport à ce qu'aurait pu faire penser un degré d'alcool de 4 %, doux mais bien savoureux. Ses saveurs sont on ne peut plus représentatives des hefe-weizenbiers : chewing-gum surtout ; notes fruitées douces, en particulier sur la banane ; une pointe épicée de clou de girofle et une touche miellée, amenant toutes deux un côté presque chaleureux pas désagréable. En fin de bouche, l'amertume est quasi-absente et laisse la place à une persistance épicée agrémentée d'un retour rétro-nasal de notes céréalières : malt légèrement touraillé et blé soufflé.

Fabien nous a fait une Hefe-Weizen classique, qui reproduit fidèlement les caractéristiques du style. Elle est légère en alcool, plus légère même que la plupart des Allemandes que l'on connaît bien, mais elle dégage autant de saveurs typiques : douceur fruitée, douce chaleur épicée... C'est simple, on ferme les yeux, on est en Bavière ! 😉 À accompagner de salaisons comme il se doit ou, si on veut faire plus exotique, de plats asiatiques légers.

Petit rappel pour ceux qui veulent en savoir plus sur Independent House et ses craft beers : 

À retrouver, entre autres, chez Hyperboissons Dijon

Lire aussi, sur la même brasserie : 


mercredi 14 novembre 2018

Dégustations-ventes de bières chez Hyperboissons

Il y a peu, chez Hyperboissons Dijon-Chenôve, est née l'idée de proposer des soirées dégustations-ventes "privées" consacrées à la bière. Au cours de ces soirées, seraient présentées 5 bières sélectionnées dans la gamme du magasin, et un accompagnement alimentaire auquel elles se marient bien. 

Ces dégustations-ventes se dérouleraient au magasin de Chenôve, en petits comités d'une vingtaine de personnes maximum, ce qui permettrait de réunir connaisseurs, amateurs et autres curieux pour un moment de pédagogie autour du produit, de dégustation, de food-pairing, d'échanges et de détente. 

Et c'est bibi qui en serait l'animateur !

Le déroulement serait similaire à celui des dégustations-ventes privées que j'animais chez les gens en tant qu'indépendant jusqu'à il y a peu : 
  • Un topo sur le brassage et ce qu'il donne comme bières ; 
  • une présentation rapide des 5 bières qui seront dégustées au cours de la soirée, avant présentation plus approfondie au fur et à mesure de la dégustation ; 
  • dégustation des bières présentées, accompagnées de petites choses à grignoter qui se marieront très bien avec ; 
  • remise d'un résumé écrit des explications fournies au cours de la soirée ; 
  • lors des achats que vous pourrez faire par la suite, vous bénéficierez de tarifs spéciaux sur les bières qui auront été présentées tout au long de la dégustation.
La première dégustation-vente aura lieu le vendredi 30 novembre prochain à 19h30. Elle sera l'occasion de présenter des bières artisanales parmi les toutes dernières arrivées dans nos rayons ces derniers mois, bourguignonnes et d'ailleurs en France et en Europe.

Prix d'entrée : 15 € par personne. 

Pour tout renseignement ou réservation : 
03 80 40 39 06 (demandez Tanguy)
ou


mardi 13 novembre 2018

Bienvenue à Independent House !

J'ai un nouveau boulot depuis quelques mois (Hyperboissons à Dijon), et il se trouve que ce dernier représente une bonne raison de plus d'aller visiter des brasseries. Notamment celles qui apparaissent autour de nous et qui promettent. Et c'est exactement ce que mon collègue Nico et moi avons fait il y a quelques jours, lors d'une journée commune de repos. Eh ouai, même en repos on est sur le pont ! Oui, enfin on ne fait pas ça tous nos jours de repos non plus hein, faut pas déconner...

Bref, nous nous sommes rendus à Longvic, commune de l'agglomération dijonnaise, sur les lieux d'une toute nouvelle brasserie qui a ouvert ses portes il y a à peine quelques semaines : Independent House et ses handmade craft beers. Fabien Zaphiropoulos, bientôt 29 ans, nous a ouvert les portes de son local tout juste aménagé pour une petite visite.

Fabien s'est reconverti dans la production de bières après avoir travaillé dans l'électronique et avoir brassé en amateur durant des années - il a commencé en 2012 - dans son garage. Un parcours désormais on ne peut plus classique, mais qui se révèle souvent efficace pour se lancer en tant qu'artisan-brasseur : on commence tranquilou dans la cuisine ou le garage, pour soi-même puis pour l'entourage et les potes ; on s'exerce en prenant ces derniers ainsi que soi-même comme cobayes et, en fonction de leurs remarques et de ses propres impressions, on améliore les recettes vers ce que l'on aime vraiment ; on fait goûter à plus de monde, on s'améliore encore ; et finalement, on atteint le succès. Et c'est ce succès qui pousse à se lancer. Exactement ce qu'il s'est passé pour Fabien, comme pour bien d'autres. Fabien a, de plus, approfondi ses connaissances en passant le Diplôme Universitaire "Opérateur de brasserie" de La Rochelle en 2017. Il a lancé son projet en avril 2018, et réussi à lancer réellement son activité en octobre dernier. C'est donc, vous l'aurez compris, tout jeune. Mais avec six ans de brassage amateur et une formation, on n'a pas non plus affaire à un lapin de trois semaines du brassage : ses deux premières créations, qui ornent déjà nos rayons, sont plutôt sympathiques.

Et voilà où tout se passe...


Tout y est : cuve de brassage au centre (qui fonctionne en monopalier de température, c'est-à dire que l'eau du brassin est chauffée jusqu'à atteindre une température précise, et est ensuite maintenue à cette température durant un temps bien calculé pour extraire sucres fermentescibles et non-fermentescibles, chacun dans une quantité bien déterminée, prévue par le brasseur en fonction de la bière qu'il veut faire), entre la cuve où chauffe l'eau du brassage et la cuve d'ébullition, toutes trois cerclées de bois ; fermenteurs et cuves de maturation sur la gauche. Mais ce n'est pas tout. Une fois embouteillée, la bière doit refermenter et maturer, et ce dans une salle tempérée.

Patiente maturation pour les bières, déjà encartonnées pour être prêtes à partir à l'issue de celle-ci.
Et, une fois la période de maturation terminée, c'est l'heure pour les bières "Independent House" de partir chez les revendeurs tels que nous, mais aussi d'être dégustées. Ce qui est possible directement à la brasserie via un petit bar que Fabien a aménagé à cet effet. 


Et comme nous avions visité, nous n'allions bien évidemment pas quitter la brasserie sans une petite dégustation. Ce à quoi nous nous sommes prêtés avec plaisir, cela va sans dire ! Nous avons débuté avec une Session IPA uniquement en vente à la brasserie, suivie de l'Hefe-Weizen dont nous disposons déjà dans nos rayons, blanche à l'allemande rafraîchissante, légère (4 % alc./vol) et malgré cela bien savoureuse, typique du style en fait. Nous avons aussi eu le privilège de déguster en avant-première de futures nouveautés : une West Coast IPA, et une autre dont je ne parlerai pas ici, laissant bien évidemment à Fabien le soin d'annoncer sa sortie et le style de bière concerné. Ceci dit, deux premières bières sont déjà à découvrir soit à la brasserie, soit chez les revendeurs : l'Hefe-Weizen susmentionnée, ainsi qu'une American Pale Ale. Vous devriez pouvoir en découvrir une description dans ces pages d'ici peu. 


Une toute jeune brasserie qui semble prometteuse : la découverte des premières créations de Fabien, ainsi que de celles à venir, a été plaisante, tout en légèreté et en saveurs, et augure de belles choses dans le futur. On ne peut en attendre moins d'un artisan aguerri par plusieurs années de brassage amateur, qui a de plus pris le soin d'approfondir ses connaissances avec une formation et des stages. Avec son matériel de brassage d'une capacité de 5 hectolitres, Fabien peut atteindre la production de 250 hectolitres par an. Pour sa première année, il souhaite atteindre les 150 hectolitres, en attendant mieux, ce qu'on lui souhaite. Bienvenue au nouvel arrivant ! 

Pour en savoir plus sur la brasserie : 
Independent House
Fabien Zaphiropoulos
6 rue du 19 mars 1962
21600 Longvic
tél : 06 52 80 69 35
mail : contact@ih-beer.com
Ouverture au public les jeudi et vendredi.

Des bières à retrouver en format 33 cl, entre autres, chez Hyperboissons
110 avenue Roland Carraz
21300 Chenôve
03 80 40 39 06

mardi 30 octobre 2018

Prosit ! La weizenbier sauce Two Dudes

Vous vous rappelez d'Amandine et Pierre, les Two Dudes de Tournus (71) ? Je vous ai pas mal bassinés avec eux et leurs créations au printemps dernier. Notamment avec leur IPA, la Little Mumbaï, primée au festival dijonnais des Houblonnades. Donc, je ne vous referai pas le laïus de la présentation de la brasserie et de son concept. Et pour ceux qui n'auraient pas suivi, comme d'hab, je les invite à cliquer sur les liens placés en fin de bafouille.

Ici, c'est l'une de leurs créations du printemps dernier qui va nous occuper. À l'époque, j'avais pu la déguster lors de sa présentation aux Houblonnades. Elle m'avait plu, mais je ne savais plus vraiment pourquoi exactement : nombreuses furent les dégustations qui la précédèrent et lui succédèrent, je l'avoue... Et je n'avais plus eu l'occasion de passer par chez eux afin de leur en subtiliser une petite bouteille. Jusqu'à récemment...

Pour cette création, les Two Dudes se sont essayés à la weizenbier, ou weissbier. Avec un certain succès. Ainsi est née "La Rue du Bœuf... #27 Prosit !", que nous appellerons Prosit ! pour plus de commodité. Pour cette weizenbier, c'est la 27e recette testée qui fut la bonne, si j'ai bien compris la signification de ce "#".

Mais au fait, c'est quoi une weizenbier ? On sait que c'est un style de bière né en Allemagne. Bon d'accord, mais ça ne nous avance pas à grand chose. On sait aussi que ce n'est pas une blonde légère, lumineuse et limpide - pils, hell, etc... - dont les Allemands ont le secret. Bon, mais encore ? Weizenbier signifie, en gros, "bière de froment". Le terme Weizen est, dans bien des cas, remplacé par weiss (blanc/blanche) car nombre de weizenbiers se parent d'une robe blond pâle, très souvent trouble (protéines de froment et levures en suspension). Mais on ne peut utiliser le terme weiss pour toutes les weizenbiers, certaines étant blondes foncé, ambrées, voire même brunes. Comme quoi, toutes les bières blanches sont des bières de froment, mais toutes les bières de froment ne sont pas blanches. Certaines weizenbiers peuvent être "kristall", filtrées et limpides. Les autres sont "hefe", ce qui veut en gros dire qu'elles sont non-filtrées. Les hefeweizenbiers ont un goût plus prononcé que les kristallweizenbiers (ne causant absolument pas l'Allemand, je ne sais pas si on les appelle comme ça, mais on dira que oui...) du fait de la présence dans les premières, contrairement aux secondes, de levures notamment. De haute fermentation, les levures allemandes destinées aux weizenbiers auraient subi, au fil du temps, une mutation dont le résultat a été de donner aux hefeweizenbiers de forts goûts fruités : banane notamment, chewing gum (pas très glamour pour une bière, on est d'accord, mais c'est bel et bien vrai), et épicés (clou de girofle en particulier). La filtration, donc l'évacuation de ces levures, explique des saveurs plus douces et légères chez les kristall.

Qu'en est-il, pour revenir à nos moutons, de la weizenbier des Two Dudes ? Eh bien, il s'agit d'une hefeweizenbier. Mais comme elle est à la sauce Two Dudes, elle ne suit pas tout à fait la tradition allemande de n'y mettre que de l'orge, du froment, de l'eau, du houblon et de la levure. Nooon, il y a un ou deux p'tits trucs en plus... Premier truc, l'infusion de thé Earl Grey en "Flame out". Flame out ? Kézaco, me direz-vous ! Je comprendrai puisque moi-même j'ai dû demander une explication du terme, qui veut tout simplement dire que le thé a été ajouté à la fin de l'ébullition, juste après extinction de la flamme. Après la fermentation principale, haute, débute une phase de "dry citronelling", comme me l'a si bien dit Pierre. Pour tout de suite clarifier les choses, on parle ici d'une phase de dry hopping non pas avec du houblon, mais avec des bâtons de citronnelle. À partir de ce type d'information, attendez-vous déjà à goûter quelque chose d'atypique et d'un chouïa plus savoureux que la douceur fruitée et légèrement épicée des hefeweizenbiers classiques. Sinon, ce ne seraient pas les Two Dudes... Et, une fois n'est pas coutume, j'ai aussi eu des infos sur les levures utilisées. Eh oui, parce que outre leur capacité à transformer les sucres fermentescibles en alcool, les levures apportent elles aussi leur contribution aux saveurs de la bière. Deux types de levure sont utilisées pour la Prosit ! :

  • la levure T58, qui développe des arômes épicés, poivrés ; les esters qui découlent de son travail de fermentation peuvent apporter des notes fruitées à la bière ; 
  • la levure WB06, qui est paraît-il idéale pour la fermentation des bières blanches, et donne des notes d'esters et de phénols caractéristiques des bières blanches ; elle a aussi une bonne capacité à rester en suspension pour donner un trouble naturel à la bière.
Enfin, comme ses sœurs, Prosit ! est refermentée en bouteille durant sa maturation, cas classique. Pour la dégustation, je pense qu'il ne faut pas la boire trop fraîche, comme on aurait tendance à le faire avec une weizenbier classique (ce qui n'est pas forcément la meilleure des idées). Il me paraît plutôt raisonnable de la déguster aux environs des 8-9° C.

La  Rue du Bœuf... #27 Prosit !


Au visuel, elle revêt une robe blond foncé au trouble important et aux légers reflets dorés et se coiffe d'une tête de mousse d'un blanc éclatant, vive et abondante, aérée, légèrement collante en fins morceaux de dentelles. Elle se révèle bien persistante en un col relativement épais.

Au nez, son bouquet est fruité et épicé. Ce sont tout d'abord de fortes notes citronnées qui sautent au nez, derrière lesquelles on décèle des tons plus doux de fruits exotiques tels que la banane ou encore l'ananas. En arrière-plan, se font sentir des pointes épicées de clou de girofle. 

En bouche, l'entrée est très vive, à l'image de la mousse. De texture onctueuse et légère, le corps se révèle plutôt puissant par ses saveurs, notamment de fortes notes fruitées et acidulées de citronnelle et de bergamote. Ces dernières se partagent la prédominance avec un caractère épicé où les notes de clou de girofle s'affirment pour donner un côté chaleureux marqué à cette hefeweizenbier revisitée. Sur la fin, les céréales se rappellent à notre bon souvenir avec des notes de pâte à pain. L'amertume de fin de bouche et assez peu perceptible, éclipsée par les notes épicées, mais révèle cependant de légères pointes d'agrumes.

Une weizenbier de caractère grâce à une vivacité affirmée, des tons citronnés acidulés et une chaleur épicée inattendus quand on connaît le style allemand pur. Encore une fois, les Two Dudes ont fait preuve de talent et d'originalité, continuant ainsi dans la droite ligne de ce qu'ils proposent depuis leurs débuts. Pas grand chose de plus à dire... Si ce n'est qu'on peut la savourer accompagnée de moules sauce curry, de viande salée, ou encore de charcuterie fumée. Pourquoi pas un bleu modéré au fromage, type bleu d'Auvergne ou Fourme d'Ambert. Enfin, un sorbet d'agrumes en dessert. 

Petit rappel pour ceux qui veulent en savoir plus sur les Two Dudes : 

Lire aussi sur la même brasserie : 



dimanche 23 septembre 2018

Une Elixkir pour les aventuriers

Je ne ferai pas l'offense aux lecteurs habitués de ces pages de leur présenter une énième fois la Brasserie Elixkir. Ceux qui ne connaissent pas encore peuvent toujours s'en remettre aux liens qui sont glissés en fin de bafouille. Et de toute façon, ce serait rajouter de la matière à des posts par trop souvent trèèèèès longs... Il va seulement être question ici de leur dernière création : l'Elixkir Gose Gingembre.

Pour celle-ci, Guillaume et Amélia ont eux aussi succombé à la mode de la "sour beer", de plus en plus répandue depuis quelques années chez les artisans-brasseurs du monde entier. (Pour ceux qui ont envie de se faire mal au crâne avec une explication de ce qu'est la "Sour beer", je les invite à relire ma bafouille sur la triple brett de la Brasserie La Roteuse : La Roteuse fait aussi dans le "Brett"). Ils ont effectivement revisité, à leur manière cela va de soi, le style "Gose". Un style né en Allemagne on ne sait exactement où, ni exactement quand... Précis tout ça, non ?

Sans sources, certains donnent près de 1000 ans de vie à ce style de bière. Plus réalistes, des sources datées le feraient remonter à la fin du XVe siècle. Son lieu de naissance serait vraisemblablement la petite ville de Goslar (Basse-Saxe), près de laquelle s'écoule une rivière nommée - quelle coïncidence ! - Gose. De plus, le sous-sol de cette région minière est pour partie sillonné de mines de sel, donnant à cette rivière une grande richesse en sels minéraux qui caractérisent les goses brassées à Goslar par la Brasserie... Goslar. On y trouve effectivement de légères pointes salées, caractéristique principale de cette déclinaison du style "sour". On sait, d'après des textes datés de 1738 que la gose était  aussi présente au XVIIIe siècle à Leipzig (Source : https://www.brasseriedudzo.ch/les-styles-de-biere-gose/).

Après avoir manqué de disparaître plusieurs fois, notamment lors des deux guerres mondiales, le style a survécu, au moins sur le papier, où des recettes ont pu être conservées. Ce n'est qu'après la réunification de l'Allemagne que des brasseurs de Leipzig se remirent à en brasser (Source : https://www.brasseriedudzo.ch/les-styles-de-biere-gose/). La gose fit son retour à Goslar en 2003 grâce à Odin Paul, maître brasseur de la Brasserie Goslar, sur une recette concoctée par un confrère retraité à partir de sources originales. Ce dernier demanda à Odin Paul de perpétuer la tradition de la gose (Source : Ouvrage collectif, Le Grand Livre des Bières, Éditions Prisma, 2013, p. 55).

Alors, j'avais pas raison de vous épargner la présentation de la Brasserie Elixkir ? Je ne sais pas faire court je vous dis ! Confirmation ci-après...

Mais, au milieu de tout ça, revenons à la gose d'Elixkir. Comme le veut la tradition, il s'agit d'une bière de blé (donc, pour compliquer un peu tout cela, une bière en partie de blé, et en partie d'orge, cette dernière céréale étant essentielle du fait de sa capacité bien supérieure à libérer ses sucres fermentescibles. Ça va ? vous suivez ?). Brasser une gose, c'est long et ça peut aussi (encore !) être long à expliquer... Il s'agit de bières de fermentation mixte, où interviennent des levures traditionnelles et des bactéries lactiques, les levures faisant leur boulot de fermentation haute normale, les bactéries lactiques produisant l'acide lactique qui donne son acidité à ce type de bière. Dans le temps les brasseurs utilisaient des cultures de levures renfermant déjà des bactéries lactiques (c'est toujours le cas chez Rodenbach en Belgique). Aujourd'hui, les brasseries modernes utilisent beaucoup la technique du "kettle souring", consistant tout simplement à séparer acidification du moût et fermentation, afin de mieux contrôler l'acidification (merci à Amélia et Guillaume pour toutes ces explications, et celles qui suivent).

C'est le cas chez Elixkir, où le moût, obtenu comme d'hab par mélange de céréales et d'eau chauffée progressivement, est ensuite amené brièvement à ébullition une première fois, puis refroidi à 35-40°C pour être ensemencé de lactobacillus plantarum (ça vous la coupe, hein !), culture pure de bactérie lactique. Et c'est parti pour une fermentation lactique de 36 heures ! À la suite de quoi, le moût acidifié est mis à ébullition de façon traditionnelle, tuant ainsi les bactéries lactiques et arrêtant donc l'acidification au moment voulu. Et c'est seulement à ce moment-là qu'est ajouté le houblon, en faible quantité dans le cadre du brassage d'une gose. Mais tout ça c'est pour une gose traditionnelle. Or, chez Elixkir, ils n'aiment pas trop le traditionnel et comme ils sont créatifs, ils ont eu l'idée d'ajouter un peu de gingembre râpé en toute fin d'ébullition, histoire d'ajouter un peu de piquant à cette acidité. Mais n'oublions pas que l'une des caractéristiques principales de la gose est ce côté salé très atypique pour une bière, même acide. J'arrête tout de suite ceux qui l'auraient pensé : non, Guillaume et Amélia ne sont pas allés avec leur citerne à Goslar puiser l'eau de la Gose. C'est tout simplement une pincée de sel de Guérande qui leur a permis d'arriver à ce résultat pour la leur. Pour le reste, ce sont des levures de fermentation haute classiques qui prennent le relais et la bière mature ensuite dans les mêmes conditions que ses soeurs. Tout cela en fait en tout cas une bière «sour» d'une grande originalité réservée aux amateurs d'acidité et aux aventuriers avides de nouvelles découvertes.

Tout cela mis à part, elle titre 4.8 % de teneur en alcool, ce qui en fait une bière légère, qu'on boira aux environs des 6-7°C.



Au visuel, elle se pare d'une robe d'un blond très pâle et trouble, faisant penser à la robe d'une bière blanche : on est dans le ton de ce à quoi doit ressembler la robe d'une gose. Elle se coiffe d'une tête de mousse blanche vive et de très faible tenue : ici aussi, tout est normal.

Au nez, elle développe des arômes très acidulés, apparentés à ceux d'un lambic ou d'une gueuze, mais en plus citronnés. On est en tout cas bien sur les arômes typiques d'une bière sour. Ces premiers arômes sont assortis de notes caractéristiques et marquées de gingembre, ainsi que d'autres légèrement terreuses. Là aussi on peut être surpris mais, le gingembre mis à part, ça colle tout à fait au style.

En bouche, l'entrée est vive et sèche. Elle donne sur un corps de texture légère et sèche là aussi, aux saveurs acidulées, voire carrément acides où l'on retrouve ce caractère citronné. Très vite, le côté épicé du gingembre - qu'on ne peut pas louper - ajoute un sacré piquant sur le bout de la langue, auquel s'ajoute une pointe salée dans un surprenant mélange. Mais après plusieurs gorgées, le bout de la langue n'est plus le seul concerné : le piquant du gingembre et la chaleur qui l'accompagne se propagent à tout le palais pour persister longuement ensuite. L'amertume est inexistante et laisse la place à une persistance relevée et chaleureuse de gingembre. Elle est cependant adoucie par un retour rétro-nasal de céréales panifiées. L'acidité, le côté salé et l'absence d'amertume sont, ici aussi, tout à fait normaux et collent bien au style.

Vous aurez pu remarquer que je m'essaie à un peu de pédagogie afin de faire en sorte que ceux qui ne connaissent pas la gose, et sont donc un peu, beaucoup, voire très très très surpris, le soient un peu moins et n'aillent pas penser que cette bière a eu un problème à la fabrication, ou est un peu "passée". Il faut effectivement savoir que lorsque l'on s'attaque à une gose, on va avoir affaire à un produit très particulier. Et encore plus venant de Guillaume et Amélia, dont l'ajout de gingembre est très loin de passer inaperçu. Alors il peut être compréhensible que certains reculeront devant la description ci-dessus. Mais si vous êtes curieux et aventurier, alors foncez ! Vous aimerez peut-être, détesterez peut-être, mais toute expérience est bonne à prendre pour affiner ses goûts. Si vous l'aimez, accompagnez-la d'une assiette de charcuterie et viande sèche, ou de fromage de chèvre frais, ou encore de fromage de chèvre grillé arrosé d'un filet de miel, qui aura le don d'adoucir le tout.

Petit rappel pour ceux qui veulent en savoir plus sur Elixkir : https://www.brasserieelixkir.fr/

A lire aussi : 

jeudi 6 septembre 2018

J'ai essayé Lupulin Monster

Retour vers la Belgique et sa "nouvelle scène brassicole" qui sort des sentiers battus et rebattus par les grandes brasseries et abbayes que nous connaissons maintenant très bien, même ici en France. C'est à l'une des créations d'Enigma Brewery que la présente bafouille est consacrée.

Enigma Brewery, pour ceux qui en doutaient de par son nom, est bel et bien une brasserie belge, flamande qui plus est, située à Heusden-Zolder (si vous n'arrivez pas à le prononcer du premier coup, pas d'inquiétude, c'est normal...). Mais elle a cela de bien que, loin de se refermer sur sa langue à l'image de certaines autres, elle suit une tendance consistant à s'exprimer en Anglais, au moins sur son site Internet. Ce qui donne à ce site l'avantage d'être tant soit peu compris par tout le monde.

Chez Enigma Brewery, chaque bière a sa petite histoire ou son petit message, véhiculé notamment par des étiquettes artistiques et hautes en couleur. Et pour ce qui la concerne, comme c'est elle qui est à l'honneur ici, Lupulin Monster invite tous les amateurs de houblon à sortir leurs griffes pour s'emparer d'elle. Effectivement, elle regorge de houblons.

Il s'agit effectivement d'une IPA dry-hoppée avec pas moins de cinq houblons parmi les plus aromatiques, dont la lupuline a ainsi pu donner le maximum d'elle-même :
  • le Citra, un américain aux notes de pêche et tropicales d'agrumes, citronnées notamment ;
  • le Mosaic, un américain complexe comme une mozaïque, ses arômes allant de notes d'agrumes  et fruits tropicaux à d'autres terreuses, herbacées ou encore résineuses ;
  • l'Amarillo, un autre américain aux caractéristiques florales et fruitées d'agrumes comme la mandarine ; 
  • le Centennial, un américain (encore !) aux arômes floraux et citronnés ; 
  • l'Hallertau blanc, un allemand (devinez qui est l'intrus !) au bouquet floral et fruité faisant penser au vin blanc, paraît-il... (je ne confirme pas, je n'ai malheureusement jamais pu le sentir en vrai).
Vous avez peut-être pu remarquer (c'est assez subtil...) que les brasseurs d'Enigma Brewery ont un tout petit faible pour les houblons américains... Mais on ne saurait leur en faire grief : s'il est une chose que l'on ne peut reprocher aux américains de l'avoir envoyée chez nous, c'est bien leurs houblons ! Pour le reste, nous avons affaire à une IPA de fermentation haute, refermentée en bouteille, titrant 7 % de teneur en alcool. La déguster aux alentours des 8°C me semble être une bonne idée.

Lupulin Monster


Au visuel, sa robe ambre claire est trouble mais se laisse traverser de reflets ambrés à cuivrés. Sa tête de mousse blanche, abondante et bien aérée, se révèle bien collante en d'épaisses et larges dentelles, et bien persistante en un col épais.

Au nez, ses arômes sont prononcés mais empreints de douceur pour un bouquet aux notes biscuitées de malt, et surtout houblonnées de fruits exotiques : agrumes (citron, pamplemousse), mangue, fruits de la passion, grenade, leetchi... Une vraie salade de fruits exotiques quoi ! On termine sur une pointe résineuse de pin.

En bouche, on attaque sur une belle vivacité qui débouche sur un corps plus doux et moelleux mais ample. Plein de saveurs fruitées, il dégage, comme au nez, des saveurs d'agrumes (citron, pamplemousse) et autres fruits exotiques (mangue, grenade notamment). De légères saveurs résineuses et épicées viennent agrémenter le tout sur la fin. L'amertume, marquée et aux notes de pamplemousse, arrive progressivement : d'abord en harmonie avec le corps fruité, puis elle prend doucement sa place et finit par s'affirmer pleinement. Elle persiste assez peu cependant, laissant plus de place à une certaine persistance fruitée. 

Il est effectivement clair que l'amateur de houblon en a pour son argent avec Lupulin Monster. Les plus belles caractéristiques des houblons ci-dessus cités sont présentes chez elle pour un bon bol d'exotisme. Une bonne IPA, comme j'en ai peu bu ces derniers temps. Rafraîchissement et plaisir gustatif, elle donne tout ce que l'on demande à ce style de bière. À essayer avec de la charcuterie fumée type Brési, du gibier en sauce, du bleu d'Auvergne ou du Langres, ou encore une salade de fruits exotiques.

Petit rappel pour ceux qui veulent en savoir plus sur Enigma Brewery : 


lundi 13 août 2018

«No Future» ? Pas sûr...

J'en avais déjà entendu parler depuis des années, en avais même déjà goûté une gorgée ou deux par-ci par-là sans pouvoir approfondir. Mais ça y est, j'ai débuté l'exploration de la gamme de la brasserie alsacienne Sainte Cru. Et je l'ai débutée par l'une de ses plus impressionnantes créations, au nom évoquant l'anarchisme à travers l'un de ses plus fameux slogans : No Future.

Quid de la Brasserie Sainte Cru ? La Brasserie Sainte Cru, ce sont trois brasseurs qui, en 2007, ont débuté leur exploration, leur recherche de ce qui manquait dans les bières qu'ils buvaient. Une recherche qui aurait abouti avec la rencontre du style IPA. Ce sont les houblons du Nouveau Monde qui leurs manquaient. De là a commencé une histoire des plus classiques d'amateurs qui ont commencé avec une cuve 20 litres chez eux, ont affiné leurs recettes, ont augmenté leurs capacités de production et fait goûter leurs produits largement autour d'eux, et enfin se sont lancés devant le succès de leurs breuvages. Un succès qui, encore aujourd'hui, ne se dément pas. Et ce n'est certainement pas moi qui le démentirai.

Mais la Brasserie Sainte Cru, c'est aussi une dose de militantisme pour certaines valeurs : pacifisme, nihilisme, néolibéralisme (vraiment ?), satire, anti-autoritarisme... Bon pour être honnête, je ne sais pas si tout cela est véridique, étant données les contradictions entre certains termes, ou si c'est de la satire complète justement. Mais ce sont des mots qui s'attachent aux bières de la brasserie. Une chose sûre est que ces mots forts mais contradictoires - un chouïa fous et provocants peut-être ? - résument bien un autre pan de la devise des brasseurs : "1/3 d'illumination, 1/3 de folie et 1/3 d'anticonformisme, 100 % d'orgasme gustatif".

Et tout cela mis à part, qu'est-ce que No Future ? Eh bien, ce n'est rien moins qu'un Imperial Stout. "Et c'est quoi ça, un Imperial Stout ?" Je savais que certains poseraient la question, donc j'ai pris les devants. Boah, il s'agit juste d'une bière noire du type de cette bière irlandaise connue mondialement qui commence par G..., mais à la puissance 10. Rien de bien méchant en somme... Un p'tit breuvage sympa, un chouïa foncé, un tout p'tit chouïa puissant et riche, dont le style fut créé à l'orée du XVIIIe siècle pour le tsar Pierre le Grand, et dont la Grande Catherine fut un peu plus tard une immense consommatrice. No Future est un p'tit truc de ce genre-là, brassé à partir de malts d'orge pâle et foncés pour la couleur et les saveurs. Ce sont aussi des malts de blé, qui participent notamment à la bonne tenue de la mousse. Il y a certainement des céréales torréfiées sans être passées par la case maltage pour accentuer encore la couleur et les saveurs. Tout cela mélangé suivant des doses savamment étudiées pour lui donner simultanément une couleur plus noire que le goudron et une teneur élevée en alcool. Des houblon (dont les variétés ne sont pas plus mentionnées que celles des malts) sont ajouté, sûrement en quantités, pour contrebalancer un tant soit peu les saveurs très corsées dues aux malts. Et tout simplement parce que le houblonnage massif est le leitmotiv de la brasserie. De fermentation haute, elle est refermentée en bouteille. Elle titre 11 % de teneur en alcool, ce qui en fait une bière très forte, à déguster raisonnablement et sans se presser. Et ce, aux alentours de 14-15° C.

No Future

Le Rouge et le Noir ne trompent pas...
Au visuel, elle s'habille d'une robe noire opaque et se coiffe d'une tête de mousse brun clair, couleur mousse d'espresso, abondante et compacte, bien collante en très fins morceaux de dentelles, bien persistante en un fin col.

Au nez, ce beau col de mousse laisse s'échapper des arômes bien perceptibles et corsés, aux tons grillés, mêlant notes torréfiées type espresso à café noir fort et fortes notes de chocolat noir.

En bouche, l'entrée est peu effervescente, de texture liquoreuse - presque huileuse - mais se révèle tout de suite chaleureuse. De là, on aboutit sur un corps réunissant des saveurs correspondant au bouquet ressenti au nez : les notes chocolatées sont encore plus marquées, mais laissent tout de même une belle place aux notes torréfiées de café noir et d'espresso, envahissant le palais sans pour autant être écoeurantes. On perçoit une pointe réglissée et de fruits noirs macérés dans l'alcool, avant une amertume tout en grillé assez rude, mais qui pourrait l'être encore plus si l'alcool ne venait arrondir les angles et apporter une touche très chaleureuse tout le long de la dégustation. Une chaleur et des saveurs qui persistent longuement en bouche une fois la gorgée savourée et avalée.

Un Imperial Stout anti-autoritaire (si si, c'est écrit sur la bouteille) qui, paradoxalement, fait autorité à mon sens. Imperial Stout, déjà, ça calme... 11 % de teneur en alcool, ça impressionne... Du début à la fin, No Future impose le respect en alliant une certaine rudesse à une douceur certaine, tel quelqu'un qui saurait manier l'autorité avec justesse et justice. Alors pardon aux brasseurs si j'offense leur anti-autoritarisme, idée qui a pourtant mon adhésion, mais voilà ce que No Future m'inspire. Et je ne sais pas ce qu'il en est de cette bière elle-même, mais la Brasserie Sainte Cru a un futur, c'est certain. Et qu'est-ce qu'on mange avec No Future ? Pourquoi pas un fromage de chèvre cendré bien affiné, ou un fromage à croûte lavée cendré ? Ou alors un dessert comme une forêt noire, une mousse au chocolat, un dessert au café, ou tout simplement une tablette de bon chocolat noir. Ou rien du tout, si ce n'est dans un fauteuil le soir avec un bon bouquin (avertissement : le lendemain, vous n'êtes pas assuré de vous souvenir de ce que vous avez lu la veille...).

Petit rappel pour ceux qui veulent en savoir plus sur la Brasserie Sainte Cru : 
14 rue Denis Papin
68000 Colmar
06 74 10 67 81

mardi 7 août 2018

Basket Case, étrange melting pot

Voici venir la Basket Case, petite bière sympa produite par la Bossuwé Brewing Company. Il s'agit, selon l'étiquette, d'une ISA ou Indian Summer Ale. Sacré charabia, non ? Eh bien on n'est pas au bout de nos surprises. En effet, cette bière au nom à consonance anglophone venue d'une brasserie au nom à consonance plutôt africaine, est en fait... belge. Il s'agit de l'un des souvenirs que j'ai ramenés de mon dernier voyage du côté du plat pays. 

Elle est de fait brassée à Kortrijk, Courtrai pour les francophones peu habitués à la transformation flamande des noms de ville. Alors, pourquoi Bossuwé ? Pourquoi Bewing Company et non pas Brouwerij ? Pour Bossuwé, allez savoir... Pourquoi Brewing Company ? Parce qu'il semble, d'après mes observations, qu'il soit de plus en plus courant d'appeler sa brasserie "Brewing Company" plutôt que "Brasserie", y compris en France. j'ai aussi pu l'observer en Espagne, ou encore en Italie... Est-ce que cela fait plus branché de copier Américains et Anglais ? Bref, concernant la Bossuwé Brewing Company, c'est plutôt un bienfait, et cela dénote une ouverture d'esprit un peu plus importante chez ses brasseurs que chez d'autres brasseurs flamands. Beaucoup de ces derniers s'évertuent effectivement à écrire en flamand uniquement, rejetant toute autre langue alors qu'ils vivent dans un pays multilingue. À la Bossuwé Brewing Company, on écrit Anglais, Flamand, Français et allemand, excusez du peu... 

Et cette ISA, est-ce une IPA ou Indian Summer Ale est-il un style à part entière que je ne connaîtrais pas ? Ce ne serait pas étonnant, les styles et sous-styles sont tellement nombreux aujourd'hui... Est-ce une IPA, auquel cas on pourrait l'appeler Indian Summer Pale Ale. Est-ce un sous-style d'IPA ? Diffcile à dire. Toujours est-il qu'après quelques menues recherches, j'ai constaté qu'il ne s'agit pas de la seule brasserie au monde à "classer" l'une de ses bières sous le nom d'ISA. Je sais aussi qu'elle a été brassée durant l'automne 2017 et qu'elle est dry-hoppée ou houblonnée à sec. Alors cet étrange style serait-il celui d'une IPA qu'on ne pourrait brasser que l'automne, durant l'été indien ? Que de questions ! Questions auxquelles les brasseurs répondront peut-être mieux que moi...

Et que dire de "Basket Case" qui, dans la plupart des traductions que j'ai pu trouver, se rapporte à l'expression "cas désespéré" ? 

Quoi qu'il en soit, on semble être face à un sacré mélange de cultures avec cette Basket Case, ISA brassée à la Bossuwé Brewing Company de Kortrijk/Courtrai...

Toujours est-il qu'elle est brassée à partir de malts Pils et Pale Ale, alliant saveurs de pain frais, biscuit, miel, fruits confits... Pour l'assaisonnement, ce sont les houblons Colombus et Bramling Cross qui sont ajoutés. Le colombus est un américain aromatique et/ou amérisant, caractérisé par des notes d'agrumes et d'épices. Le Bramling Cross est un britannique, paraît-il privilégié pour le houblonnage à sec (ou dry-hopping), caractérisé par des notes de fruits frais (ex : cassis) et de citron. Et c'est bien ce dernier qui a été utilisé en dry-hopping pour la Basket Case. De fermentation haute, elle est refermentée en bouteille et titre ainsi 6 % de teneur en alcool, ce qui en fait une bière semi-forte. On la dégustera idéalement, à mon humble avis, aux environs de 7 à 8° C.

La Basket Case

Que vient faire ce singe sur l'étiquette ? Encore une autre étrangeté...
Au visuel, elle se pare d'une jolie robe ambrée légèrement voilée, aux reflets ambre foncée à cuivrés. Elle se coiffe d'une tête de mousse blanc cassé fine et compacte, parsemée de grosses bulles. Bien collante en larges morceaux de dentelles, elle persiste bien en un fin col.

Au nez, elle laisse s'échapper des arômes fruités avec des bouffées d'agrumes sympathiques pour commencer, accompagnées de notes florales et épicées prononcées, ainsi que de touches biscuitées très légèrement caramélisées.

En bouche, l'attaque est bien effervescente, qui donne sur un corps sec, vif et puissant. Ses saveurs sont fruitées, sur les agrumes entre orange et pamplemousse. Le malt se fait sentir aussi avec ses tons biscuités. Un bouquet ponctué par de belles notes florales et épicées avant une amertume suffisamment prononcée pour être désaltérante, sans être trop envahissante avec son caractère mêlant notes herbacées et de pamplemousse. Elle persiste bien dans la bouche.

L'étrange melting pot que constitue cette bière sympathique, du nom de la brasserie à son style en passant par son propre nom est déjà séduisant et intrigant. Le breuvage que renferme la bouteille est lui aussi plutôt séduisant : sécheresse et vivacité rafraîchissantes ; amertume désaltérante ; saveurs agréables plutôt portées sur les notes fruitées, florales et épicées ; le malt biscuité ne se fait pas oublier. Tout cela pour un ensemble que les brasseurs qualifient de "vaguely English Golden Ale" mais qui n'a rien à envier à une bonne IPA classique. On pourrait l'accompagner de fromage aux fortes saveurs comme un vieux Comté ou du Langres, voire un morceau de Fourme d'Ambert. Ou, par fortes chaleurs, une salade de chèvre frais. Ou encore une salade de fruits bien fraîche mêlant fruits de chez nous et fruits exotiques.

Petit rappel pour ceux qui veulent en savoir plus sur la Bossuwé Brewing Company : 
Bossuwé Brewing Company
Engelse Wandeling 2 k8k
8500 Courtrai
0032 494 54 05 36
0032 479 13 26 29


dimanche 22 juillet 2018

Une belge, une Vrééé de Vrééé

Il y a peu, au hasard du passage pas loin de la famille venue de Belgique, m'est arrivée une belle inconnue. Elle provenait d'une brasserie artisanale tout aussi inconnue de mes services : l'Authentique Brasserie, basée à Blaton, dans le Sud de la Belgique, à l'Ouest de Mons et à quelques encablures de la frontière avec la France. Pour ce qui est de la belle inconnue - ne l'oublions pas quand même... -, elle s'appelle La Vrééé Blonde. C'est-y pas un nom sexy ça ? 

Une expérience agréable qui m'a démontré autant que rappelé que scène brassicole belge ne rime plus depuis longtemps uniquement avec les productions des plus grosses brasseries, désormais devenues des classiques pour n'importe quel grand amateur français de bières : Duvel-Moortgat, les abbayes trappistes, Lefebvre, Dupont, Palm, Van Honsebrouck, De Halve Maan et j'en passe beaucoup... Je n'en suis pas à ma première expérience des artisanales belges. J'en ai déjà évoqué dans ces pages ces trois dernières années : la Brasserie Minne (anciennement Brasserie de Bastogne, ou La Troufette), la Brasserie ardennaise de La Gleize et sa gamme "La 44", les Bobelines de Spa, De Dochter-Van de Korenaar et ses Bravoure, Noblesse et autres... Mais ce n'est qu'un minuscule aperçu d'une scène brassicole artisanale qui regorge sans doute de tout autant de trésors que par chez nous. Et il était de bon ton que cela me soit rappelé pour élargir mon champ d'expériences un peu trop franco-français, voire bourguignonno-bourguignon. Pour ne pas non plus oublier mes origines. Enfin, pour constater une fois de plus avec plaisir que le monde brassicole belge ne s'est pas endormi sur ses glorieux lauriers et a, lui aussi, pris le train de la révolution micro-brassicole mondiale initiée aux States il y a pas loin d'une quarantaine d'années. 

Revenons à notre belle inconnue. Elle est brassée à base de malts d'orge et de froment et, bien évidemment, houblonnée avec... ben je ne sais pas ! A se demander de quoi ont peur les brasseurs qui n'indiquent pas le nom de leurs ingrédients... Bref, ce n'est pas grave et ce n'est pas le plus important. De fermentation haute, elle est refermentée en bouteille. À la sortie, elle titre ainsi 6 % de teneur en alcool. Une ale semi-forte donc, qu'on dégustera aux environs de 7-8° pour ne rien en perdre.

La Vrééé Blonde


Au visuel, elle offre aux yeux une robe d'un blond foncé tirant sur l'ambre claire, au léger trouble et aux reflets dorés intenses. Le tout agrémenté d'une vive effervescence, fine et serrée. Sa tête de mousse blanche abondante est bien collante en épaisses et larges dentelles, et de longue tenue en un épais col. 

Au nez, cette tête de mousse exhale des arômes floraux et épicés (m')évoquant le clou de girofle. On distingue aussi des notes fruitées sur la pomme et de discrets tons citronnés. Le malt se manifeste aussi tout de même par petites touches biscuitées et miellées. 

En bouche, l'entrée est vive et plutôt sèche, donnant une impression de fraîcheur. Une impression qui s'atténue vite pour laisser la place à un corps de texture plus ronde et moelleuse, où le bouquet floral prédomine là aussi, supplantant les mêmes tons fruités qu'au nez. On retrouve aussi ces mêmes notes épicées qui empêchent le moelleux du corps de prendre l'ascendant. On distingue, au milieu de tout cela une douce touche miellée. Pour finir, la fin de bouche est marquée par une amertume herbacée modérée mais bien persistante. 

Une Vrééé de Vrééé belge, dans la tradition de ce qui se fait de meilleur au plat pays, avec une belle vivacité épicée qu'équilibre un moelleux agréable. Le tout entouré d'un bouquet floral prononcé, voire prédominant. Si l'on ajoute à cela la légèreté et la vivacité rafraîchissantes de l'attaque, on obtient un breuvage agréable autant au rafraîchissement qu'à la dégustation. Et pour ne rien gâcher, on peut même l'accompagner de viande marinée cuite au barbecue, de moules et frites sauce curry ou à la bière tout simplement, de Beaufort d'été ou de vieux Gouda, ou encore de chocolat blanc.

Petit rappel pour ceux qui veulent en savoir plus sur l'Authentique Brasserie : 
Authentique Brasserie
5 rue de Condé
7321 Blaton, Province du Hainaut, Belgique
0032 69 58 07 78

jeudi 12 juillet 2018

Les Echappées de L'Agrivoise

"Que voilà encore un titre bizarre !", vous direz-vous peut-être une fois de plus. Ou pas ! Mais comme d'habitude, je vais décortiquer ça pour vous donner de brèves explications ("Brèves ? Oah le rigolo lui, incapable de nous pondre autre chose que des romans quand il se lance dans des explications !"). Et comme j'aime bien tout faire dans le désordre, je vais commencer par L'Agrivoise et terminer avec Les Échappées.

Qu'est-ce que L'Agrivoise ? Il s'agit tout simplement du nom d'une brasserie artisanale du plateau ardéchois, située à Saint-Agrève. On peut déjà la considérer comme "vieille" en regard de la multitude de brasseries et micro-brasseries qui se sont montées ces 2-3 dernières années, puisque L'Agrivoise a été fondée en 2008 (elle fêtera d'ailleurs ses 10 ans début août prochain). Une brasserie donc déjà bien installée qui propose, forcément, sa gamme de bières, mais aussi des tireuses en location avec fûts de 20 et 30 litres, mais aussi des bières à façon pour tout type d'événement, la pose de tirages pression chez les professionnels. Outre des noms dont la signification fleure bon l'esprit rebelle, anticolonialiste et nostalgique des tentatives de révolution passées (Commune de Paris, mai 68...), sa gamme contient : 
  • L'Asociale, bière rousse "traître", 
  • la Commun'Ale, bière blonde de type American Pale Ale, 
  • la Vue sur l'Amer, ambrée de type pale ale "joyeusement houblonnée"
  • la Sous les Pavés, bière noire
  • l'Humulupucienne, bière blonde légère qui "fleure la fin de l'hiver"
  • et d'autres plus périodiques, telles que l'An que Ven, bière de Noël chaque année de recette différente. Si j'ai bien compris...
Et, parmi les périodiques et exceptionnelles, se trouve une petite gamme appelée Les Échappées dont les bières sont toutes des recettes éphémères, "des tocades brassées selon nos caprices", aux dires des brasseurs eux-mêmes. Et l'une des ces bières éphémères Les Échappées est arrivée jusqu'à moi : la Nelson Sauvin Pale Ale, sur houblonnée. "En voilà une drôle d'idée, nous présenter une bière éphémère, qu'on ne pourra plus acheter parce qu'elle n'existera sûrement plus !". Si si, je vous entends déjà le dire pour vous-même ! Elle m'a plu, et c'est déjà une raison bien suffisante. Mais de plus, ça me permet de parler d'une brasserie que je n'avais pas encore présenté, et ça donne une idée du talent des brasseurs, à défaut d'avoir accès à leurs bières. La Nelson Sauvin Pale Ale est brassée à partir de malts pâle et un peu plus foncés, ambrés. Elle est assaisonnée des houblons Mosaic et, comme son nom l'indique, Nelson Sauvin.
  • Le Mosaic est un houblon américain issu du croisement des houblons Simcoe et Nugget, à la complexe palette aromatique fruitée (des agrumes aux fruits exotiques en passant par les fruits rouges) et végétale (notes herbacées, terreuses, de pin...).
  • Le Nelson Sauvin est néo-zélandais, aromatique et/ou amérisant, et est connu notamment pour ses arômes de Sauvignon blanc, grâce notamment à ses notes exotiques de fruits de la passion.
Pour le reste, on a affaire à une bière de fermentation haute refermentée en bouteille. Elle titre ainsi 5.8 % de  teneur en alcool. Ce qui en fait une bière légère qu'on dégustera fraîche sans être glacée, de façon à ne pas lui péter son bouquet sympa, autour des 6-7° C.

Les Échappées, Nelson Sauvin Pale Ale


Au visuel, elle arbore une robe ambre claire trouble, aux reflets dorés. Elle se coiffe d'une tête de mousse blanche abondante que j'ai l'habitude de qualifier de "rocailleuse" pour signifier qu'elle ne s'atténue pas de façon uniforme, mais par morceaux (eh oui, désolé pour les puristes, je ne suis pas copain avec l'intégralité du vocabulaire distingué des grands dégustateurs...). Pour le reste, cette mousse se révèle bien collante, en larges dentelles, et bien persistante en un épais col.

Au nez, ses arômes sont doux et fruités avec notamment des notes exotiques où les fruits de la passion ressortent, accompagnés de notes d'agrumes (orange, citron...). Ces tons fruités sont environnés d'arômes plus doux aux notes biscuitées de malt et d'autres légèrement miellées. Une pointe herbacée et résineuse se fait jour en arrière-plan.

En bouche, on attaque sur une douce effervescence et une texture relativement ronde et riche. Le corps est puissant et se compose d'un bon équilibre entre des saveurs biscuitées et miellées moelleuses et de belles notes d'agrumes et de fruits de la passion, avec là aussi une pointe résineuse sur la fin. Lui succède une amertume prononcée et tranchante aux fortes notes herbacées, persistante. Une certaine dose d'astringence accompagne cette amertume pour une finale sèche.

Ce qui ressort de cette Pale Ale, outre qu'elle est bonne (un peu trop facile...), c'est l'équilibre réussi entre malté moelleux et houblonné fruité au niveau du corps. Mais aussi cette même réussite dans l'équilibre entre la rondeur moelleuse du corps et la sécheresse tranchante de l'amertume marquée de la fin de bouche. Bref, une bière équilibrée quoi... Et ça, chez moi, c'est signe de savoir-faire et de talent. Et pour ne rien gâcher, on peut tenter de l'associer à des fruits de mer, une pièce de viande ou des saucisses épicées bien grillées au barbecue. Mais aussi à un bout de Comté ou de gruyère suisse 24 à 30 mois d'affinage, ou de tomme autrichienne aux fleurs. Enfin, au dessert, je suggère une salade de fruits exotiques ou un sorbet orange ou fruits de la passion.

Petit rappel pour ceux qui veulent en savoir plus sur la Brasserie : 
Route du Pont
07320 Saint-Agrève
04 75 30 70 76

mardi 26 juin 2018

La Pale Ale des Ducs : fraîcheur et légèreté

Je me fais plus discret en ce moment, mais je n'oublie pas de continuer à déguster des bières. Et il n'aura (peut-être) pas échappé aux lecteurs assidus de ces pages que je n'ai pas achevé de présenter les bières de la toute jeune Brasserie des Ducs, basée à Longchamp. De fait, dans la gamme "Hop'Stination", il manque la Pale Ale.

Je ne m'amuserai pas à vous encombrer cette bafouille en vous présentant une nouvelle fois la brasserie et ses gérants Luc et Vanessa. Donc sans plus perdre de temps, passons à cette Pale Ale, idéale pour les chaudes journées qui s'annoncent encore prochainement.

Trois malts et du froment interviennent dans sa composition : 
  • du malt pale ale aux notes à dominante de pain, fruits confits et miel ;
  • du malt Caravienne pour donner du corps et une partie de sa couleur à la bière, ainsi que des notes toastées ;
  • du malt ambré (touraillé à une température oscillant entre 150 et 160° C) pour compléter la couleur et ajouter des notes biscuitées.
  • du froment, utilisé notamment pour une bonne tenue de mousse.
Au niveau du houblonnage, Vanessa et Luc assaisonnent leur Pale Ale de :
  • houblon américain Mosaïc, croisement des houblons Simcoe et Nugget à la complexe palette aromatique fruitée (des agrumes aux fruits exotiques en passant par les fruits rouges) et végétale (notes herbacées, terreuses, de pin...) ; 
  • houblon américain Cascade, l'une des coqueluches des artisans brasseurs du monde entier avec ses arômes floraux et épicés, résineux et d'agrumes, ainsi que son amertume type pamplemousse.
Pour le reste, la Pale Ale de la Brasserie des Ducs est une bière de fermentation haute, refermentée en bouteille et titrant 5.4 % de teneur en alcool. Une bière légère donc, que je suggère de déguster fraîche, aux environs de 5-6° C.


Au visuel, elle se pare d'une robe ambrée légèrement trouble aux beaux reflets cuivrés. Elle se coiffe d'une tête de mousse blanc cassé abondante, à grosses bulles, légèrement "rocailleuse", bien collante en longues et larges dentelles, bien persistante en un col épais.

Au nez, les arômes sont plutôt discrets mais dégagent d'agréables notes de fruits exotiques, tels que la mangue, la papaye, le litchi. La clémentine et l'orange se font sentir en arrière-plan. Petite pointe biscuitée sur la fin.

En bouche, l'attaque est fraîche et finement effervescente. On aboutit sur un corps doux et de texture légère, aux saveurs tout aussi fruitées qu'au nez, avec des notes exotiques de mangue et de papaye rafraîchissantes, avant une finale à la légère amertume aux notes d'agrumes amères. Elle persiste peu cependant. On garde en bouche cette belle fraîcheur fruitée.

Cette Hop'Stination Pale Ale allie brillamment les qualités d'une bière de dégustation sympa et d'un breuvage de rafraîchissement efficace. Difficile de dire mieux. La discrétion des arômes mise à part, la fraîcheur, la légèreté et la saveur sont au rendez-vous. Et d'après mes échos, je ne suis pas le seul à le penser... Une petite suggestion d'accompagnement ? Allez ! Pourquoi pas avec des fruits de mer, du poulet mariné grillé au barbecue, du Comté doux ou du régal de Bourgogne à la papaye, ou encore une salade de fruits exotiques bien fraîche.

lundi 4 juin 2018

Una cerveza de Valencia

Rassurez-vous, cette bafouille sera écrite en Français. Non, ma langue maternelle n'est pas subitement devenue l'Espagnol. J'en baragouine bien un peu mais faut pas déconner. Ce titre me paraissait juste valoir toutes les intro de bafouille...

Je vous emmène effectivement en Espagne, à la Brasserie Tyris, fabrica de cervezas artesanas, basée à Valence. Une brasserie qui, cependant, ne peut s'empêcher de succomber à la mode consistant à utiliser des termes anglophones pour qualifier ses bières : craft creative beers. Je n'en sais pas des tonnes sur la brasserie elle-même, si ce n'est qu'ils sont deux passionnés à l'avoir fondée... je ne sais pas quand. Pas facile quand il est impossible d'accéder à un site Internet qui refuse de s'ouvrir... Une brasserie semblant dotée d'une certaine notoriété : on me dira que ça vaut ce que ça vaut (et "on" n'aurait pas tort...), mais sa page Facebook est suivie par plus de 14 000 personnes. Un chiffre à faire pâlir d'envie les pages Facebook de nombre de brasseries artisanales françaises. C'est tout de même un signe. Une brasserie, enfin, dotée d'une "tap room".

"Et allez ! le revoilà avec ENCORE un de ces termes new wave of brewers !". Rassurez-vous, je ne vous soûlerai pas longtemps d'explications sur ce terme, qui signifie juste que la brasserie a son propre bistrot, ou pub, où elle propose ses produits à la consommation. Certaines brasseries en France proposent aussi ce type de "room". Alors pourquoi nous casser la tête avec ce genre d'anglicisme au lieu de parler simplement de bistrot ou de pub (qui est un anglicisme aussi, je le concède) ? Allez savoir, peut-être pour faire meilleur genre, ou pour faire moins old school (oh m..., v'là que je m'y mets aussi !).

Enfin bref, venons-en quand même à la bière objet de cette bafouille : la Tyris Original. Une belle blonde houblonnée, pour partie au moins, à l'aide de houblons frais. C'est-à-dire qu'il n'est pas transformé (ni séché, ni concassé et compacté en pellets) et passe du champ à la brasserie pour utilisation immédiate. De fermentation haute, elle est refermentée en bouteille. Elle titre ainsi 5 % de teneur en alcool. Ce qui en fait donc une bière légère, que je suggère de déguster aux environs de 6-7° C.

La Tyris Original


Au visuel, c'est une robe dorée légèrement trouble qui s'offre aux yeux, traversée de reflets ambre claire. Elle se coiffe d'une tête de mousse blanche fine, bien collante en longues et fines dentelles, persistante en un fin voile à la surface. 

Au nez, les arômes sont discrets au premier abord, mais mêlent notes florales et fruitées, notamment d'agrumes et de fruits jaunes type prune-mirabelle. On distingue, au milieu de tout ça, une touche maltée panifiée.

En bouche, l'entrée est vive, fraîche et sèche. Le corps qui suit se révèle plutôt puissant et un peu plus rond du fait de notes maltées donnant des saveurs panifiées et miellées. Elles s'agrémentent de belles saveurs fruitées sur les fruits jaunes et les agrumes douces type orange ou clémentine. L'amertume de fin de bouche s'avère modérée mais rafraîchissante, avec des notes de pelures d'agrumes et doucement herbacées, persistante.

Une robe séduisante, des arômes doux et fruités, un breuvage vif, léger et rafraîchissant grâce à ses notes fruitées. Son amertume de fin de bouche ne gâche rien et désaltère son homme (ou sa femme...). Rien de révolutionnaire ici, mais tout d'agréable. Elle se mariera bien avec un bon camembert affiné ou, plus doux, un Brillat-Savarin. 

Pour en savoir plus sur la brasserie : 

lundi 28 mai 2018

Petit tour dans les Gorges

Petite idée pour cette nouvelle bafouille : je vous propose de sortir de Bourgogne et d'aller nous perdre dans le petit paradis que sont les Gorges du Verdon. Outre ses falaises escarpées, ses superbes paysages, ses routes carrément super étroites et ses petits villages accrochés aux flancs des gorges, cet écrin de nature renferme aussi, vous l'aurez deviné (ben oui, sinon pourquoi vous en parlerais-je ici ?), quelques trésors brassicoles.

Je vous amène, pour la bière de cette bafouille, dans la petite ville atypique de Moustiers-Sainte-Marie. Je ne suis pas allé chercher cette bière là-bas, celle-ci et l'une de ses sœurs étant venues jusqu'à moi. Mais une coïncidence de la vie a fait que j'ai pu visiter, il y a quelques années, cette petite commune qui a fait son nid dans la roche des Alpes de Haute-Provence. Comment ça on s'en fout de ma vie ? M'en fous aussi, je continue ! Ma première réflexion, en arrivant à Moustiers-Sainte-Marie, a été : "on dirait Minas-Tirith (cité du Seigneur des Anneaux, de Tolkien) en miniature". Oui bon, j'étais peut-être un peu geek, avant d'être beer geek... On ne peut pas être parfait à tout moment ! Bref, si vous en avez l'occasion, visitez cette petite ville étonnante adossée à la paroi, où l'Histoire et les hommes ont creusé et façonné tout un chemin entre les falaises menant à une petite chapelle, de laquelle s'étend un panorama qui vaut la peine de grimper jusque là. Je ne serais peut-être pas mauvais non plus, en guide touristique...

Bon d'accord, revenons à l'objet premier de cette bafouille. Parmi les petites productions brassicoles de la région, se trouve donc La Mouss'Terrienne. Il s'agit du nom de la gamme de bières artisanales brassées par les Apiculteurs Brasseurs du Verdon, basés bien évidemment - sinon je ne vous aurais pas soûlés avec ça... - à Moustiers-Sainte-Marie. Celle que je présente ici est la Mouss'Terrienne ambrée au miel. Il est difficile de trouver beaucoup d'informations sur ces bières et leur(s) producteur(s). Contentons-nous donc, à défaut de pouvoir faire l'aller-retour sur une après-midi, des infos de l'étiquette et du peu qu'il fut possible de glaner sur Internet. Cette ambrée, brassée donc à partir de malt pâle et d'autres torréfiés à plus haute température et plus foncés, est de fermentation haute et refermentée en bouteille. À quel moment intervient le miel ? Mystère, mais peut-être est-il utilisé, à l'instar de nombre d'autres bières au miel, pour la refermentation ? Mais tout cela n'est qu'hypothèse, je n'irai donc pas plus loin en conjecture. Elle titre en tout cas 7 % de teneur en alcool, ce qui en fait une bière semi-forte. On la dégustera, simple suggestion comme d'habitude, à environ 9-10° C : elle dégage un bouquet qu'il serait dommage de briser. 

La Mouss'Terrienne ambrée au miel


Au visuel, elle se pare d'une robe ambrée légèrement trouble aux reflets cuivrés et est parcourue d"une effervescence plutôt vive. Et elle se coiffe d'une tête de mousse blanc cassé à ivoire vive, de bonne tenue et bien collante en bouts de dentelles fines, bien persistante en un fin col.

Au nez, cette tête de mousse exhale des arômes prononcés d'épices (cannelle, clou de girofle...) et miellés, chaleureux. On peut percevoir, au second plan, une pointe toastée de malt.

En bouche, l'attaque est vive et débouche sur un corps puissant et astringent. De texture ronde et moelleuse, miellée, il développe des saveurs épicées marquées et chaleureuses, toujours sur la cannelle, les clous de girofle... Une touche toastée à briochée de malt ne se fait pas oublier, avant une fin de bouche à l'amertume herbacée très légère et peu persistante. En revanche, chaleur et saveurs épicées persistent plus longuement.

Il m'a rarement été donné de déguster une bière au miel aux saveurs épicées si prononcées et chaleureuses. La rondeur et le moelleux du corps sont les bienvenus pour contrebalancer cette puissance. Une bière étonnante qui élargit le champ de vision qu'on a habituellement de ce style, où la douceur prime en général. Bien que moins alcoolisée, elle m'a paru révéler plus de puissance en bouche que la bien connue Barbar. Une bière de caractère, à l'image de sa commune de naissance. En accompagnement, elle se mesurera bien à un fromage épicé tel que de la Tomme de brebis au piment d'Espelette, une tomme autrichienne aux fleurs sauvages ou encore au Saveur du Maquis (fromage de brebis corse, couvert d'un mélange d'herbes aromatiques agrémenté de petits piments rouges). Pourquoi pas encore un puissant Époisses ou un morceau de vieux Comté (30 à 36 mois).

La brasserie : 
Les Apiculteurs brasseurs du Verdon
Gaec BMV Scipion
Chemin de Melen
04360 Moustiers-Sainte-Marie
apiscipion@gmail.com
06 72 73 77 88