mercredi 13 mars 2019

Elixkir : après la Part des Hommes, la Part du Lion

Amélia et Guillaume ne s'arrêtent plus ! C'est bien évidemment pour vous parler d'une autre de leurs récentes créations que cette bafouille est présentée à votre approbation, vous l'aurez compris. Vous vous dites peut-être que ça fait beaucoup d'Élixkir... Ben vous êtes encore loin du compte ! Si je devais présenter toutes les créations récentes des petits prodiges d'Élixkir, j'y passerais mes nuits ! Comment j'exagère ? Bon d'accord, peut-être un peu... Il reste tout de même qu'ils nous sortent des nouveautés, éphémères ou pas, à une fréquence relativement élevée. Mais je ne présente pas tout : d'autres dégustations s'offrent à moi, tout ne peut pas me plaire - ce serait trop beau - et puis... ben j'ai un boulot et une famille quand même ! "Oah, le gars y fait style il est overbooké !"

Bref, il n'y a pas longtemps, je vous décrivais ma dégustation de leur très bon stout impérial, ainsi que le plaisir que ce dernier m'avait procuré. Cette fois, avec un degré d'alcool et une puissance similaires, place à l'Élixkir Barley Wine, sous-titrée "La Part du Lion" (la part de celui qui est sur l'étiquette, je pense : je la lui laisse en tout cas, l'a pas l'air commode...), à ne pas confondre avec leur gamme de bière vieillie en fûts, nommée "La Part des Hommes". Pas besoin de  vous faire un dessin sur le style de bière qui sera décrit ici : certains diraient que "seuls les vrais sachent", mais pour ceux qui ne connaîtraient pas, il peuvent en retrouver la petite histoire - ou légende - en suivant ce lien La "Burgonde 10" : la Côte-d'Or fait aussi du vin d'orge. Je ne vous en ferai pas plus sur la brasserie et ses deux brasseurs : là aussi, "seuls les vrais sachent" et, pour ceux qui voudraient devenir des vrais, rendez-vous en fin de bafouille avec pleins de liens à suivre.

Ce barley wine est composé de différents malts d'orge : pâle en grande partie pour amener tous les sucres fermentescibles nécessaires à un degré d'alcool élevé ; mais d'autres aussi, plus colorés car torréfiés à plus haute température, pour la couleur assez sombre en général de ce type de bière, ainsi que pour lui donner une partie de son complexe bouquet. Une autre partie de ce bouquet est amenée, bien évidemment, par le houblon. Deux houblons sont intervenus pour ce barley wine : le houblon El Dorado tout d'abord, un américain aromatique et amérisant aux notes de fruits tropicaux surtout et, plus discrètes, de poire et melon ; le houblon Bramling Cross, un aromatique britannique, donc utilisé en fin d'ébullition et/ou en dry-hopping, aux notes de fruits frais tels que le cassis.

Le processus de brassage de ce barley wine, plutôt complexe, s'est inspiré d'une méthode appelée le "Parti-Gyle". "Houlalalalaaa, qu'est-ce qu'il nous pond encore comme terme new wave of brewers ?", entends-je déjà... Eh ben raté ! Rien de new wave là-dedans, cette méthode anglaise étant tout ce qu'il y a de plus traditionnelle et utilisée depuis le XIXe siècle au moins, par des brasseries telles que Fuller's (Londres), ou Bass (Burton Upon Trent, haut lieu historique du monde brassicole anglais). La méthode consiste à empâter une première fois avec peu d'eau, sans rincer les drêches de façon à obtenir un moût à haute densité en sucres. L'opération peut-être réitérée avec le grain restant une deuxième fois, voire une troisième, en obtenant des jus de densité chaque fois moins élevée. Le but peut être de mélanger les différents moût obtenus pour créer telle ou telle bière. Dans le cas du barley wine, seul le premier moût est utilisé et mis directement à fermenter après ébullition : haute densité en sucres fermentescibles égale forte teneur en alcool. Mais, comme vous le savez peut-être, la marque de fabrique d'Élixkir, c'est d'aimer la tradition, faire vivre des styles de bière historiques, mais à sa sauce... Alors si on s'arrêtait là, ce serait trop simple et moins drôle. D'où mon expression "inspiré du Parti-Gyle". Ils m'ont expliqué avoir en fait procédé à un "double mash". Bon là, pour le coup, je vous concède que ça fait très terme new wave of brewers. Le double mash est une méthode dont l'objectif est d'obtenir un moût de très haute densité initiale et, en prolongement, un degré d'alcool élevé une fois la fermentation terminée. La méthode consiste à faire un premier empâtage filtré, sans trop rincer le gâteau. Ce jus déjà bien sucré va ensuite servir de base à un deuxième empâtage puisqu'on va verser une nouvelle tournée de malt, non pas dans de l'eau comme à l'accoutumée, mais dans ledit moût. Après une seconde filtration, on obtient un moût à la densité encore plus élevée. Ce dernier est ensuite, très classiquement dans le processus de brassage, porté à ébullition avant d'être envoyé en fermenteur afin de laisser les levures faire leur travail et donner une bière au degré d'alcool important. Il y a évidemment eu refermentation en bouteille par la suite de façon, notamment, à gazéifier un peu le breuvage. Ils ont ainsi abouti à une bière titrant 11 % de teneur en alcool, une bière donc très forte qu'on peut déguster à une température de cave. Normal pour un vin d'orge : imaginez boire un vin rouge glacé... J'espère vous avoir appris une ou deux petites choses avec ces procédés plutôt complexes. En tout cas, moi j'en ai apprises avec ce barley wine. Et pour ceux qui n'auraient pas suivi, je ne peux faire bien mieux, y ayant moi-même mis le temps. Quant à ceux qui se sont endormis, ben... réveillez-vous, on n'a pas fini ! 

Élixkir Barley Wine


Au visuel, s'offre aux yeux une robe rousse trouble aux reflets rouges vifs à cuivrés, surmontée d'une tête de mousse abondante et vive, foncée aux tons jaunes à orangés, collante en fines dentelles serrées et entremêlées, persistante en un mince voile à la surface.

Au nez, les arômes sont bien perceptibles et doux, aux notes de fruits rouges confiturés , la cerise notamment, et caramélisées. On décèle aussi des tons biscuités et de fruits secs.

En bouche, l'attaque est douce et légèrement effervescente. Le corps lui aussi se montre doux, riche et soyeux. Ses saveurs font davantage ressortir les fruits secs qu'au nez, ainsi que son côté caramélisé, biscuité, voire brioché. Les notes de fruits rouges sont toujours présentes, mais davantage sous forme de fruits macérés dans l'alcool. le tout est enveloppé d'une chaleur alcoolisée marquée et persistante, qui vivifie un peu ce moelleux. L'amertume de fin de bouche se montre marquée et persistante, tranchante avec ses notes herbacées. Elle persiste assez peu, cédant la place au côté chaleureux de cette bière, qui s'installe pour longtemps.

Un barley wine bien exécuté, de mon point de vue, où l'on retrouve tout ce que l'on y cherche : richesse et douceur de texture, corps bien charpenté, saveurs puissantes et complexes, amertume suffisante à équilibrer un corps moelleux et riche, chaleur enveloppante et persistante. Cette dernière provoque un certain bien-être pour peu qu'on savoure le breuvage par petites lampées, ce qui ne gâche rien... Un barley wine à savourer sans rien d'autre qu'un canapé et un peu de musique, un bouquin ou un bon film. Mais il peut aussi accompagner de la viande braisée légèrement épicée, de la charcuterie fumée, un morceau de roquefort et/ou de vieux cheddar, une tarte tatin ou encore une tarte aux fruits rouges.

Petit rappel pour ceux qui veulent en savoir plus sur Elixkir : https://www.brasserieelixkir.fr/

A lire aussi : 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire