Il était temps ! J’ai enfin honoré une promesse faite il y a plus d'un an : celle de me pointer à Pont-de-Pany, dans la vallée de l'Ouche, pour y visiter la Brasserie La Kanopée, parmi les dernières arrivées sur la scène brassicole côte-d'orienne. Il était temps car cette brasserie a bouclé sa première année d'existence, le 25 mars dernier. Avec un peu d'avance, son premier anniversaire a d'ailleurs été célébré tout début mars. Une belle intuition en regard de ce qui nous est arrivé sur la figure par la suite... Enfin bref ! Donc depuis un an, discrètement mais sûrement, elle s'est fait une place dans le paysage brassicole du département et de la région. Alors il était temps !
Une histoire de famille
La Kanopée, c'est tout d'abord une histoire familiale. Certes la première personne à laquelle on pense lorsque l'on parle de La Kanopée, c'est bien sûr son brasseur, Thierry Kniebihler. Mais il y a en fait six personnes qui se sont lancées dans l'aventure avec lui : son épouse, sa fille, ses deux fils, ainsi que les conjoints de sa fille et de l'un de ses fils. Seul Thierry y travaille à plein temps, mais chacun apporte sa pierre à l'édifice à sa façon, à l'image de l'un de ses fils qui a conçu les étiquettes des bouteilles, colorées et élégantes.
Après avoir travaillé durant 25 ans dans l'agroalimentaire chez Nestlé, ainsi que comme responsable technique dans des domaines viticoles de Chagny à Carcassonne, Thierry s'est retrouvé au chômage. Se posait donc, bien évidemment, pour lui comme pour ses proches, la question de ce qu'il allait bien pouvoir faire pour en sortir. Or, il se trouvait que Thierry brassait en amateur depuis un certain temps. Tout avait commencé avec un simple kit de brassage reçu en cadeau, qui lui a permis de commencer avec des recettes toutes faites. Et ce qu'on appelle parfois le "virus du brassage" s'est emparé de lui, le poussant à faire ses propres expériences, élaborer ses propres recettes, augmenter les quantités pour en faire profiter plus de monde autour de lui. Une histoire devenue un grand classique du genre, somme toute. Et au moment où se posa la question de son avenir, quatre recettes étaient justement presque stabilisées. La réponse à la question s'imposait d'elle-même...
Une gestation d'un an
Ainsi a débuté l'aventure. Thierry et ses proches (et désormais associés) ont décidé de se lancer dans l'élaboration de ce projet. Elle débuta donc fin-2017.
Classiquement, cette élaboration impliquait la recherche de financements, celle d'un local adapté, la réflexion sur le meilleur matériel à adopter... Bref, des trucs assez peu ragoûtants, mais par lesquels il faut bien passer. Mais la période a aussi été jalonnée d'instants plus sympas, comme la visite de plusieurs brasseries à Clermont-Ferrand, Narbonne, ou encore en Normandie. Elles ont été autant d'occasions d'échanges et de prises de conseils, notamment sur les erreurs à ne pas faire lorsque l'on monte une brasserie. Cela a aussi été l'occasion d'un petit séjour de perfectionnement à l'Institut Français de la Brasserie et de la Malterie (IFBM pour les intimes), en particulier pour fixer les bases, les paramètres de départ, la marche à suivre... "J'ai reçu énormément de conseils à l'IFBM", m'a affirmé Thierry, qui m'a confié y retourner régulièrement pour des journées de formation à thèmes, et pour ne pas perdre le contact avec les gens qu'il y a rencontrés.
Petit à petit, le projet a fini par se concrétiser, avec en particulier la location du local actuel, en novembre 2018. À partir de là, ont commencé toute une série de travaux d'aménagement, en particulier de la salle de brassage, ainsi que de la petite salle attenante à la brasserie, destinée à accueillir les clients désirant se désaltérer.
La brasserie en photos
|
On entre par la petite salle accueillant le public : quelques tables, un comptoir, pour une ambiance cosi et détente... |
|
La visite commence avec la salle où sont entreposées les matières premières, et où Thierry s'occupe de moudre ses céréales au moulin du fond. |
|
Juste à côté se trouve la salle des stocks, où quilles et fûts attendent de trouver preneur. |
|
Au centre du local, se tient la salle de brassage, juste sous une ouverture pratiquée dans le toit du local, de façon à apporter de la lumière naturelle, ainsi qu'à évacuer facilement le trop-plein de vapeur lors des phases d'ébullition. |
|
Contre le mur de la salle de brassage trônent les fermenteurs. |
|
Et au bout de la chaîne, se trouve l'étiqueteuse-embouteilleuse-capsuleuse, ligne issue du milieu viticole et réadaptée à la brasserie par les bons soins de Thierry. |
Un ancrage local
Forte de cette unité de brassage plutôt modeste, la Brasserie La Kanopée revendique un ancrage local, rayonnant dans la Vallée de l'Ouche et jusqu'à Dijon. «On ne verra pas de bières de La Kanopée à Lille, Paris ou Lyon !», s'amuse Thierry. Les canaux de distribution sont divers, à commencer par la vente et la consommation sur place. Enfin, ça c'était avant l'irruption de la corona-saloperie... La conso sur place, on n'y pense plus pour le moment, et la vente sur place se limite au retrait en drive de commandes faites en ligne. On trouvera aussi La Kanopée dans le réseau «La Ruche qui dit oui !». Enfin, bien évidemment, dans pas mal d'épiceries fines de la région environnante et chez certain cavistes.
Une brasserie qui se veut locale jusque dans ses représentations et son nom. De fait, ses étiquettes colorées représentent des animaux de la forêt bourguignonne. Et la brasserie et son environnement immédiat étant entourés de bois et forêts, il paraissait presque naturel de la baptiser de ce nom évoquant l'éco-système formé par la cime des arbres forestiers. Le «K» de Kanopée n'est pas une grossière erreur d'orthographe, que l'on se rassure ! Il n'est destiné qu'à rappeler que la brasserie fut fondée par la famille Kniebihler.
Et l'avenir ? Euh...
La conclusion paraîtra bizarre, mais qu'est-ce qui n'est pas bizarre en ces temps où l'on se demande de quoi sera fait l'avenir. C'est pourquoi, je ne m'attarderai pas sur d'éventuels objectifs que pouvait se fixer La Kanopée. Depuis la mi-mars, l'unique objectif est très certainement de limiter au maximum les dégâts d'une économie et d'une consommation mises à l'arrêt et hors du temps.
Mais Thierry et sa famille n'ont pas arrêté de travailler pour autant. Le contraire eût bien évidemment été encore plus désastreux. Comme j'ai pu le dire plus haut, les ventes ont continué malgré le confinement, par d'autres biais adaptés aux nécessaires «mesures barrières», comme ont été appelées certaines restrictions de nos libertés. Mais, à l'image de pas mal de ses confrères, Thierry a continué à faire marcher sa créativité avec la mise au point récente d'une nouveauté : une IPA brute.
Alors la seule conclusion qui s'impose est d'apporter mon soutien à la brasserie et à toute la famille face à la difficulté du moment. Tout comme je l'ai fait pour nombre d'autres brasseries d'ici et d'ailleurs, via la page Facebook de «Secrets de Bières». Et nul doute que, fidèle à sa philosophie, La Kanopée table déjà avec espoir sur la tendance, qui s'accroît, à consommer local, pour rebondir. La Corona-saloperie aura, espérons-le pour tous les artisans-brasseurs, eu ça de positif sur les façons de consommer.
Force restera à la bière !
Brasserie La Kanopée
Hameau de Pont-de-pany
255 rue de la Gare
21410 Sainte-Marie-Sur-Ouche
contact@la-kanopee.com
06 99 55 83 74
Horaires à consulter sur le site ou sur la page Facebook de la brasserie.